Voici une très jolie découverte aussi douce qu’un bonbon...
Madame Ming aime parler de ses dix enfants vivant dans divers lieux de l’immense Chine. Fabule-t-elle, au pays de l’enfant unique ? A-t-elle contourné la loi ? Aurait-elle sombré dans une folie douce ? Et si cette progéniture n’était pas imaginaire ? L’incroyable secret de Madame Ming rejoint celui de la Chine d’hier et d’aujourd’hui, éclairé par la sagesse immémoriale de Confucius.
Le résumé, tout comme le titre, m’a tout de suite plu et comme il ne faisait que 115 pages, j’ai immédiatement jeté mon dévolu sur lui. Et que vous dire sinon que c’est encore du très bon Éric-Emmanuel Schmitt ?
Il s’agit d’un petit conte, mettant en scène la très attachante Madame Ming ainsi qu’un Parisien souvent amené à voyager en Chine, dans la province du Guangdong, afin de conclure des contrats avec des magasins de jouets « made in China ». Et quand il négocie, il aime créer le doute et l’attente chez ses interlocuteurs… Alors, il s’éclipse subitement, afin de se réfugier dans les toilettes. Et c’est dans ces sous-sols de ce Grand Hôtel qu’il fait la rencontre de Madame Ming, la Dame Pipi. La conversation s’engage, un peu par hasard, et très vite, lors de ses pérégrinations chinoises, il n’a plus qu’une envie : se rendre dans le royaume de Madame Ming afin de poursuivre inlassablement leurs conversations sur la vie, la Chine, les enfants.
Le texte est émaillé d’une kyrielle d’aphorismes, tous plus délicieux les uns que les autres, et qui ne peuvent que susciter la réflexion du lecteur. J’ai ai noté des dizaines au cours de ma lecture mais je ne vous en citerai qu’un, mon préféré « La vérité m’a toujours fait regretter l’incertitude ».
Mais ce qui fait surtout le charme incontestable de ce conte, c’est bel et bien cette fameuse Madame Ming qui cultive le mystère et qui distille des phrases acidulées qui piquent l’esprit. Et lors de chaque rencontre, elle confie à ce Parisien des morceaux de vie, en lui décrivant ses enfants, tous détenteurs d’un don, d’un talent hors norme, d’un destin unique ou loufoque : créateur de jardins chimériques, casse-cou acrobate, machine à mémoire… Un plaisir de découvrir Li Mei, Ting Ting, Kun et Kong, Da-Xia et leurs autres frères et sœurs.
Or, comme le narrateur, nous avons peine à croire, dans ce pays de l’enfant unique, que Madame Ming puisse être la mère d’une fratrie de 10 enfants. Et qui plus est d’enfants aussi extraordinaires. Alors, au fil des pages, on s’interroge… tantôt on ne peut que la croire, et tantôt on ne peut que douter… Mais peu importe au final : qu’elle soit mère de famille nombreuse ou affabulatrice en puissance, elle dégage une sympathie irrésistible, qui agit tant sur son interlocuteur que sur le lecteur. Et il faudra attendre les dernières pages pour découvrir le dénouement… très émouvant.
Alors, si vous avez envie de savoir si Madame Ming est l’heureuse maman d’une extraordinaire famille de 10 enfants ou si elle vit une vie rêvée et fantasmée, il faudra que vous découvriez cet adorable petit conte, plein de douceur, de poésie et de profondeur.
Ma note :