A l’époque, j’avais acheté dès
sa sortie « Le Chuchoteur », qui avait été une grosse déception notamment à cause du manque de plausibilité et des « facilités » de trop nombreux rebondissements.
Mais j’avais tout de même été bluffée par cette histoire si sombre et j’avais trouvé un grand potentiel à cet auteur, d’où mon envie de persévérer.
Et grand bien m'en a pris puisque c'est avec plaisir que je viens de lire le second tome des aventures de Mila, paru
chez Calmann-Lévy. En effet, pour moi, il s’agit davantage de nouvelles aventures plutôt que d’une suite directe. Il y a, certes, plusieurs
références au Chuchoteur tout au long du livre (et je dois dire que je n’avais presque aucun souvenir vu que j’avais lu celui-là dès sa sortie, en
2010) ; cependant cela n’entrave pas la compréhension du roman qui, selon moi, peut se lire sans avoir lu le
premier.
Résumé : « JE LES CHERCHE PARTOUT. JE LES CHERCHE TOUJOURS ». Sept ans
après s’être mesurée au Chuchoteur, Mila Vasquez travaille aux Limbes, le département des personnes disparues. L’enquêtrice excelle dans son domaine. Peut-être parce qu’elle est incapable
d’éprouver la moindre émotion. Ou peut-être parce qu’elle-même porte dans sa chair la marque des ténèbres. On a tous ressenti l’envie de s’évanouir dans la nature. De fuir le plus loin possible.
De tout laisser derrière soi. Or chez certains, cette sensation ne passe pas. Elle leur colle à la peau, les obsède, les dévore et fi nit par les engloutir. Un jour, ils se volatilisent corps et
biens. Nul ne sait pourquoi. Bientôt, tout le monde les oublie. Sauf Mila. ET PUIS, SOUDAIN, CES DISPARUS RÉAPPARAISSENT POUR TUER. Face à eux, Mila devra échafauder une hypothèse convaincante,
solide, rationnelle. Une hypothèse du mal. Mais pour les arrêter, il lui faudra à son tour basculer dans l’ombre.
« L’écorchée »
est un roman astucieusement découpé en très petits chapitres, les rebondissements sont nombreux, et l’écriture est sans fioritures et efficace, ce qui rend la lecture rapide et plutôt
addictive.
J’ai beaucoup apprécié les thèmes de ce roman, notamment ces personnes disparues, presque mortes, mais pas encore
mortes, ce qui leur donne une place (non enviable) sur les murs des Limbes, le service où travaille Mila. J’ai également adoré les toutes
premières pages du roman que j’ai juste trouvées parfaites (vraiment parfaites!). Tout d’abord un superbe
prologue consacré à la salle 13 de la Morgue, où l’on garde ad vitam mortum aeternam les corps des victimes de meurtres non élucidés. Et
ensuite, la retranscription d’un appel téléphonique entre un petit garçon aux prises avec un psychopathe assis à côté de lui, et le service d’urgence. Glaçant. Un début de roman
parfaitement réussi. Oui, vraiment, j’ai beaucoup apprécié la thématique de ce roman (avec une petite mention à la "syllogomanie", qui m’a beaucoup étonnée, et fait rire), que
j’ai préférée à celle du Chuchoteur.
Du côté des personnages, on retrouve Mila, toujours
hantée par ses démons, toujours torturée, parfois émouvante, parfois inquiétante, mais surtout, toujours aussi battante et courageuse. Mais c’est surtout le personnage de son nouveau collègue,
Berish, qui a retenu toute mon attention. Je l’ai aimé dès les premières
lignes et c’est rapidement devenu l’enjeu principal de ma lecture : découvrir comment il allait se sortir de ce pétrin dans lequel il était tombé 20 ans plus tôt. Un homme
fort et fragile à la fois, qui m’a souvent impressionnée, mais aussi émue. J’ai également beaucoup apprécié le personnage du Juge,
surprenant à plus d’un titre !
Je dois tout de même avouer que ce qui m’avait déplu dans « Le Chuchoteur » (les
facilités, les rebondissements peu plausibles, le côté « un peu tiré par les cheveux ») n’est pas absent de « L’écorchée ». Ainsi, Mila part très souvent
(toujours ?) seule à la recherche d’indices, elle prend des risques inconsidérés et se jette souvent dans la gueule du loup, ce qui est peu cohérent mais anxiogène à souhait ! Il y a également parfois de trop gros indices, trop répétés, qui nuisent
un peu à l’effet de surprise (Spoiler : comme le SDF, que j’ai venu venir à 1000 km).
Mais c’est beaucoup mieux dosé et maîtrisé que dans le premier tome, ce qui me laisse penser que
Carrisi devrait me combler de plus en plus au fil de ses prochaines parutions. La fin laissant présager un 3ème tome, qui donnera, je l’espère, les réponses tant attendues, notamment
sur les curieux agissements ayant lieu dans les cellules habitées par les coupables des 2 affaires...
Ma note :
D’autres billets (très) positifs chez Stephie, Lisalor, Reveline ; puis le billet passionné de Gruznamur. Et je n’ai pas trouvé de billet négatif (ce qui ne m'étonne pas!).
Extrait
Dossier 397 - H/5
Transcription de l’enregistrement de 6 h 40 du 21 septembre XXXX.
Objet : appel au numéro d’urgence de la police de XXXX. Standard : agent Clara Salgado.
Standard : Police. D’où appelez- vous ?
X : …
Standard : Monsieur, je ne vous entends pas. D’où appelez- vous ?
X : Je m’appelle Jes.
Standard : Vous devez me dire votre nom en entier, monsieur.
X : Jes Belman.
Standard : Quel âge as- tu, Jes ?
X : Dix ans.
Standard : D’où appelles- tu ?
X : De chez moi.
Standard : Pourrais- tu me donner l’adresse ?
X : …
Standard : Jes, pourrais- tu me donner ton adresse, s’il te plaît ?
X : J’habite à XXXX.
Standard : Bien. Que se passe- t-il ? Tu sais que ceci est le numéro de la police, n’est- ce pas ?
X : Je sais. Ils sont morts.
Standard : Tu as dit « ils sont morts », Jes ?
X : …
Standard : Jes, tu es là ? Qui est mort ?
X : Oui. Ils sont tous morts.
Standard : Ce n’est pas une blague, Jes, n’est- ce pas ?
X : Non, madame.
Standard : Tu veux me raconter ce qu’il s’est passé ?
X : Oui.
Standard : Jes, tu es toujours là ?
X : Oui.
Standard : Pourquoi tu ne me racontes pas ? Prends ton temps, si tu veux.
Jes : Oui. Il est venu hier soir. On était en train de dîner.
Standard : Qui est venu ?
X : …
Standard : Qui, Jes ?
X : Il a tiré.
Standard : D’accord, Jes. Je veux t’aider mais là, c’est toi qui dois m’aider. OK ?
X : OK.
Standard : Tu me disais qu’à l’heure du dîner un homme est entré chez toi et a tiré ?
X : Oui.
Standard : Ensuite il est parti, sans tirer sur toi. Tu vas bien, n’est- ce pas ?
X : Non.
Standard : Tu veux dire que tu es blessé, Jes ?
X : Non, qu’il n’est pas parti.
Standard : L’homme qui a tiré est toujours là ?
X : …
Standard : Jes, s’il te plaît, réponds- moi.
X : Il dit que vous devez venir. Vous devez venir tout de suite.
Conversation interrompue. Fin de l’enregistrement.